Mon article de cette semaine s’inscrit dans la lignée d’articles concernant mon grand-père et dans ma soif de petites études sur les relations entre les individus. Ici, la relation vaut la peine d’être notée car c’est une question qui m’a été plusieurs fois posée par ma famille. Et en prime, je vais même en profiter pour faire un petit point technique sur les degrés de parenté !
Mais avant cela, partons de Pierre Prosper Antoine SOULAS, l’arrière-grand-père de Louis-Joseph SOULAS mon grand-père.
Pierre SOULAS est né le 2 décembre 1802 à Coinces dans le Loiret, du mariage d’Antoine SOULAS avec Marie Louise FAVELLE. Il se marie avec Magdeleine Esther SOTTEAU le 8 juillet 1834 à Villereau à une trentaine de kilomètres de Coinces, d’où est originaire Magdeleine. Le couple vivra dans la ferme familiale du hameau de Lignerolles à Coinces où naîtront leurs quatre enfants de 1835 à 1841. Je sais très peu de chose sur la vie de Pierre, si ce n’est qu’il était cultivateur et vigneron comme son père et son grand-père… et tous les autres SOULAS avant lui ! Il décède assez jeune le 8 mars 1851 à l’âge de 49 ans à son domicile à Lignerolles.
Pierre SOULAS a une particularité, ce cultivateur beauceron est l’ancêtre commun à deux artistes : mon grand-père Louis-Joseph SOULAS qui était peintre-graveur et François SOULAS également peintre-graveur. Et c’est une relation de parenté que j’ai retrouvée il n’y a pas si longtemps. Nous savions dans la famille qu’il y avait une relation entre eux, mais François n’apparaissait pas sur l’arbre généalogique. C’est maintenant chose faite grâce aux Archives d’Orléans en ligne qui m’ont permis de consulter les Tables Décennales et les recensements jusqu’en 1912 et retrouver le lien manquant entre la branche de François et la nôtre :
François et Louis-Joseph sont donc cousins au… euh… mais à quel degré au fait ?
Déjà il faut définir de quel type de degré l’on parle, car en fait, il existe deux types de degré en parenté : le degré de parenté en droit canon et le degré de parenté en droit civil.
Le degré de parenté en droit canon
Le droit canon est l’ensemble des lois adoptés par les autorités catholiques pour le gouvernement de l’Eglise et ses fidèles. Le degré de parenté en droit canon a été utilisé par l’Eglise pendant l’Ancien Régime pour identifier la consanguinité entre deux personnes.
Pour calculer le degré de parenté en droit canon entre deux personnes, il faut regarder pour chaque personne, sa distance avec l’ancêtre commun.
Par exemple, un père et un fils sont parents au 1er degré, tout comme un frère et une sœur, alors que des cousins germains sont parents au 2ème degré. Pour deux personnes qui ne sont pas de la même génération descendante, le degré de parenté s’exprime selon la forme suivante : « cousins du xème au xème degré ».
Pour Louis-Joseph et François, cela donne cela :
Selon le droit canon, François SOULAS et Louis-Joseph SOULAS sont donc cousins du 4ème au 3ème degré.
Pour en revenir à l’utilité de ce degré pour l’Eglise, c’est sur ce degré de parenté que s’appliquent les interdictions de mariage sous l’Ancien Régime. En effet, jusqu’au XIIIème siècle, l’Eglise interdit les mariages entre deux cousins jusqu’au 7ème degré inclus. Puis à partir de 1215, cette interdiction se réduit en interdisant le mariage aux cousins seulement jusqu’au 4ème degré inclus. Mais deux tourtereaux ayant les mêmes arrière-arrière-grands-parents ne pouvaient donc pas se marier !
S’ils avaient quand même une forte volonté de se marier, il leur fallait demander une « dispense de consanguinité« , à l’Evêque s’ils étaient liés au 3ème ou 4ème degré, ou plus rarement au Pape pour des dispenses du 2ème degré. Les dispenses pouvaient être accordées par exemple à cause du manque d’habitants dans le village lorsque les deux cousins pouvaient avoir des difficultés à se marier avec quelqu’un n’étant pas de leur famille.
Le degré de parenté en droit civil
Le degré de parenté en droit civil existe depuis le début du XIXème siècle et est notamment celui utilisé aujourd’hui dans les successions.
Pour calculer le degré de parenté en droit civil entre deux personnes, il faut suivre dans l’arbre généalogique le chemin entre ces deux personnes : de la première en remontant jusqu’à l’ancêtre commun puis en redescendant jusqu’à la deuxième. Le nombre de génération entre les deux personnes en passant par l’ancêtre commun est le degré de parenté.
Pour Louis-Joseph et François, cela donne cela :
Selon le droit civil, François SOULAS et Louis-Joseph SOULAS sont donc cousins au 7ème degré.
De manière plus générale, le schéma suivant est bien pratique pour voir d’un coup d’oeil les degrés de parenté en droit civil :
Aujourd’hui la loi française interdit les mariages entre frères et sœurs, entre parents et enfants (même en cas d’adoption), et entre beaux-parents et gendre ou belle-fille. Par une dispense obligatoire de la part du Président de la République, il est possible de se marier avec son oncle ou sa tante, son neveu ou sa nièce, ou encore entre beaux-parents et gendre ou belle-fille dans le cas où le mariage initial est dissout par le décès de l’un des époux. En tout cas, selon la loi française, il est possible de se marier entre cousins.
Quant à l’Eglise, elle a aujourd’hui adopté le calcul du degré de parenté en droit civil, pour lequel le 4ème degré réduit donc l’interdiction de mariage jusqu’aux cousins germains (là encore une dispense très exceptionnelle peut être accordée).
Et voilà, la suite demain j’espère pour rattraper mon retard avec un autre Pierre SOULAS !
Et pour ceux qui veulent aller plus loin sur les degrés de parenté et notamment leur représentation, voici un article très intéressant que j’ai trouvé en me documentant :
Le droit enseigné par l’image : illustrer les degrés de parenté par la Bibliothèque Universitaire de Lyon
Merci beaucoup pour cet article qui éclaire bien ma lanterne !
[…] Donc rassurez-vous je ne radote pas, le Pierre SOULAS de cette semaine 20, est bien distinct du Pierre SOULAS de la semaine 19, c’est son grand-père en fait […]